Deviens-tu c’que t’as voulu?

Jusqu’à l’âge de 13 ans, c’est ma mère qui me coupait les cheveux. Née à la mauvaise époque pour une femme de notre société, elle a vue ses rêves, aspirations et talents étouffés par la psychose des hommes et leur obsession à asservir les femmes, les garder à la maison, les dépouiller de toute contribution collective potentielle extra-ménagère.

Assis sur un tabouret au bout du comptoir de la cuisine, à chaque coup de ciseau, j’ai entendu l’incantation préférée de cette femme aux multiples talents et au charisme renversant, répéter : « Marc, j’ai manqué ma vocation… j’ai manqué ma vocation… ».

Honnêtement, je ne savais pas de quoi elle parlait, je ne connaissais pas ce mot. Mais je ressentais la lourde portée de ces quelques syllabes imprégnées de tristesse, résignation et impuissance. Elle aurait voulu être coiffeuse, elle était forcée d’admirer ses électro-ménagers depuis qu’elle était mariée. C’est finalement ce dépouillement de sens à sa vie et de réalisation personnelle orchestré par un clergé obtus et nourri par une tribu endoctrinée et endoctrinante qui aura eu raison d’elle à 47 ans. Du gaspillage.

Des histoires de personnes qui n’ont pas pu devenir ce qu’ils auraient voulu ou ce qu’ils auraient pu à cause d’un système politique, religieux ou autres, il y en a des tonnes. Mais qu’en est-il de vous et moi, qui avons les ressources, la démocratie, la richesse, les opportunités, et que malgré tout, on passe à côté? Après des années à étudier et expérimenter le sujet, ce que j’ai appris est que cela ne se fait pas tout seul. Il faut toujours garder le destin à l’œil. Parce que le quotidien le déroute.

Si comme moi, vous n’avez pas envie de passer à côté de votre vie et de «manquer votre vocation», comme ma mère disait, écoutez – et lisez les paroles – de cette chanson de Daniel Boucher, « Deviens-tu c’que t’as voulu? ».

Près de vingt ans après sa sortie, cette mélodie et les messages inspirés de cet artiste fabuleux, qui pénètrent l’âme comme une flèche, me bouleversent encore. Mais surtout, cette œuvre, conjuguée aux destins avortés de toutes ces âmes qui n’ont pas eu le choix, chaque jour mon but est d’assurer que je réalise tous mes talents et ce que mon âme me dicte à travers mes désirs et intuitions. Je vous souhaite dans la même catégorie.

Marc André

 

DEVIENS-TU C’QUE T’AS VOULU?
Par Daniel Boucher

Deviens-tu c’que t’as voulu?
Deviens-tu c’que t’avais vu?
Deviens-tu c’que t’aurais pu?
T’as-tu fait c’qu’y aurait fallu?
Mais qu’est-ce qu’es-tu, mais qu’est-ce que t’es?
Mais qu’est-ce qu’es-tu, mais qu’est-ce que t’es?
Ma moman pensait, mon popa aussi
Que pour être aimable et aimé d’autrui
Pour aimer c’qu’on fait, pour aimer sa vie
Faut faire c’qu’on aime, c’qu’on a envie
Pis l’faire à fond, pis y mettre le prix Pis être dur parce que c’pour ça qu’tu vis
Pis quand t’aimes pour vrai, quand t’aimes la vie
Dis qu’est-ce tu penses, pis pense donc qu’est-ce tu dis, t’sé…
C’est là qu’on s’rend compte si t’es t’un front
Ou bedon si t’es t’un roadie

Deviens-tu c’que t’as voulu?
Deviens-tu c’que t’avais vu?
Deviens-tu c’que t’aurais pu?
T’as-tu fait c’qu’y aurait fallu?
Ma moman l’pensait, mon popa me l’a dit
C’qu’y a d’plus dur c’est d’être simple dans vie
T’auras beau dire non, t’auras beau dire oui
Y a du monde qui aime pas ça que t’aimes ta vie
Y a du monde qui va peut-être te traiter d’pourri
Parce que tu passes, parce que tu choisis
Tu peux rien faire si y ont pas compris
Que t’es aimes pareil même si t’es parti, t’sé?
Ça va t’arriver d’pas dormir
Ça va t’arriver d’avoir le goût d’haïr
Ça va même t’arriver de douter
De douter d’toé

Deviens-tu c’que t’as voulu?
Deviens-tu c’que t’avais vu?
Deviens-tu c’que t’aurais pu?
T’as-tu fait c’qu’y aurait fallu?
Deviens-tu c’que t’as voulu?
Deviens-tu c’que t’avais vu?
Deviens-tu c’que t’aurais pu?
T’as-tu fait c’qu’y aurait fallu?

© 2018 Marc André Morel. Tous droits réservés.