Ici mais ailleurs

Le plus grand talent inné de l’humain est son imagination. Cette capacité absolument déterminante de son destin est au cœur de toutes les révolutions, de la roue à l’intelligence artificielle, en passant par les accroissements de conscience politiques et sociaux. Tout a été créé deux fois, la première étant dans le laboratoire de l’imagination.

Albert Einstein répétait que l’imagination était plus importante que l’intelligence. À y penser un instant, il est clair que sans l’imagination, l’intelligence humaine demeurerait un majestueux et puissant voilier sans réelle direction. Car qui dit imagination, dit vision, dit direction. De là découlent nos actions et réalisations.

Tous les chemins mènent nulle part. Gare à celle ou celui qui ne prend pas la peine de se créer un chemin aligné avec ses talents et ses intuitions. Il finira par suivre le chemin tracé pour lui par un autre. Il en va de même pour nos souhaits et nos désirs. Car sinon, nous passerons notre vie à nous « contenter », comme disait nos grands-mères.

Adolescent, un des premiers livres de développement personnel que j’ai lu est «Mind Power: La puissance de votre esprit» de John Kehoe. Ce livre m’a ouvert aux possibilités et pour la première fois de ma vie, j’ai senti que j’avais le pouvoir de changer ce qui n’allait pas en moi et autour de moi. Je pouvais rêver aussi grand que je le voulais : quitter le foyer familial toxique, devenir bilingue, graduer, voyager, rencontrer mon idole, donner des conférences dans le monde.

Mais il y a une science derrière tout ça. Imaginer pour se réaliser, nous devons apprendre à le faire. C’est peut-être pourquoi nous utilisons très peu notre imagination. Pourtant, elle est gratuite et sert exactement à donner à l’humain ce qu’il désire le plus : autre chose! Et ça, autre chose, ça peut être n’importe quoi: de nouveaux meubles à un nouvel emploi, un corps plus mince à une maison de rêve.

L’imagination est à notre portée 24 heures sur 24, mais a des effets plus puissants au coucher et au réveil. C’est à cette période que le subconscient est le plus « spongieux », si l’on veut. Il pourra désormais emmagasiner – et nous renvoyer – avec plus de clarté les images pertinentes à notre vision souhaitée.

Vous souvenez-vous de votre premier appartement? Le quartier? Le bruit de la musique forte? Les voisins indésirables autour? La voiture de police pratiquement stationnée devant tous les jours? Moi oui. J’étais à l’université, je travaillais comme serveur à temps partiel, je prenais l’autobus et le métro. Le tapis commercial du 2 et demi de ma blonde et moi était aussi mince que les murs. Mais jamais je ne me suis plains. Ce quartier dysfonctionnel et dur ne me dérangeait pas du tout. Pourquoi? Parce que mon corps y était, mais mon esprit était ailleurs. J’étais déjà «ailleurs».

Être ici mais ailleurs, c’est une faculté humaine qui devient une arme de survie pour des milliers d’enfants et d’adultes qui savent être ailleurs pendant qu’ils sont ici, peu importe le degré de calvaire qu’ils vivent.

Marc André

 

Photo: Josh Hild

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