Je ne vois pas ce que je regarde
Ne pas voir ce que l’on regarde, est-ce possible?
Ne pas voir ce que l’on regarde, c’est un peu comme ne pas trouver ce que l’on cherche. Cela nous est tous arrivé. Chercher le marteau sur le mur de l’établi et jurer n’avoir rien vu, jusqu’à ce que l’on vous le pointe. Vous savez ce que je veux dire? Il était bel et bien là, sous vos yeux, tout ce temps. Le scénario se déroule autant à la maison qu’à l’épicerie, que le nez dans nos tiroirs de bureau.
Bien que certains définissent cela comme « chercher comme un homme », anthropologiquement, l’homme est en effet le chasseur des deux sexes, ayant une vision plus ciblée et sélective. La femme, nourricière, doit avoir « des yeux et des mains partout », pendant l’absence des guerriers de la tribu. Quoiqu’il en soit, le phénomène est scientifique et bien documenté. Il s’agit d’un scotome : une lacune dans le champ visuel due à l’insensibilité de certains points de la rétine (source : Wikipédia). Affectation destinée autant aux hommes qu’aux femmes, c’est un peu comme si on nous rendait aveugle de points de visions bien spécifiques. Il est donc biologiquement possible de ne pas voir ce que vous regardez.
Il y a deux mille ans, le célèbre philosophe et homme d ‘État romain, Sénèque, disait : « Ce n’est pas ce vous regardez qui est important, mais ce que vous voyez ». Le phénomène n’est pas connu d’hier.
Au delà d’objets qui qui nous passent parfois sous le nez, qu’en est-il des traits de personnalité de nos collègues? De nos enfants? Et les nôtres? En conférence, je fais parfois l’exercice de perceptions avec tout le groupe. En regardant une image, un dixième de l’auditoire verra une chose, un tiers une autre, et la balance, tout autre chose. La conclusion à faire ici est que, bien que nous travaillons avec certaines personnes depuis des années, il est possible de ne pas avoir encore vu et apprécier toutes les qualités de chacun. Idem pour nos enfants – que l’ont croit « avoir tricoté » et en connaître tous les recoins.
Et qu’en est-il de soi-même? Est-ce possible que certaines de nos qualités nous échappent? Ou des mauvaises habitudes perdues dans un « trou noir » de vision certain? Bien se connaître, c’est bien se diriger. C’est aussi bien se maîtriser – en direction, actions et émotions. Fini de courir après sa queue et vivement les réalisations, sans peur ni ressentiment.
Ce n’est pas ce que vous regardez qui est important, c’est ce que vous voyez. Ce que vous voyez de qui vous êtes entièrement. Ce que vous voyez chez les autres. Ce que vous voyez du potentiel de votre vie.
Apprenez à vous connaître davantage. Développez la curiosité de voir ce qui se cache derrière vos collègues, employés, patrons et enfants. Et si vous ne voyez pas le beurre d’arachides dans le garde-manger, c’est qu’il est dans le frigo (!)
Marc André Morel
Conférences en entreprise
Photo: Darius Bachar
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