La rivière et l’océan

En plus de deux décennies, c’est sur les doigts d’une main que je peux compter le nombre de fois où je vous ai partagé le texte d’un autre auteur. Cette fois, c’est au tour du maître poète Khalil Gibran, auteur du chef d’oeuvre «Le Prophète» et de «Le Jardin du Prophète» et «La Mort du Prophète». En temps difficiles, ce texte mérite d’être lu et relu. Une leçon toujours pertinente 100 ans plus tard.

«On dit qu’avant d’entrer dans la mer,
une rivière tremble de peur.
Elle regarde en arrière le chemin
qu’elle a parcouru, depuis les sommets,
les montagnes, la longue route sinueuse
qui traverse des forêts et des villages,
et voit devant elle un océan si vaste
qu’y pénétrer ne parait rien d’autre
que devoir disparaître à jamais.
Mais il n’y a pas d’autre moyen.
La rivière ne peut pas revenir en arrière.
Personne ne peut revenir en arrière.
Revenir en arrière est impossible dans l’existence.
La rivière a besoin de prendre le risque
et d’entrer dans l’océan.
Ce n’est qu’en entrant dans l’océan
que la peur disparaîtra,
parce que c’est alors seulement
que la rivière saura qu’il ne s’agit pas
de disparaître dans l’océan,
mais de devenir océan.»

Khalil Gibran, «La peur»

© 2020 Marc André Morel. Tous droits réservés.