Sur la route d’un conférencier No4 – Baie-Comeau

Baie-Comeau, mai 2006. La conférence se tiendra dans l’aréna, là où se jouent des parties de hockey. Il fait froid, c’est certain. La scène est installée un peu devant le centre de la patinoire.

De très longues bandes de rideaux de velours noirs sont suspendues du haut plafond. Il y en a environ une demi-douzaine qui pendent en guise de fond de scène.

Devant la scène, les dignitaires sont installés autour de tables rondes, pour un repas servi par le traiteur dont l’équipement et les camions sont sur la glace, derrière la scène.

Dans les sièges de l’aréna, des dizaines de jeunes, pour cet évènement en leur honneur.

Ça y est, on me présente et appelle mon nom. Je monte, ma conférence est lancée. Étant donné le grand espace partout autour de moi, et malgré les quelques centaines de personnes présentes, le son est mauvais, c’est très écho. Il fait froid, les gens sont loin, c’est ardu, mais ça va.

Sauf que tout juste derrière moi, pendant que je parle au micro et que je tente de me concentrer et d’engager tout le monde dans ma présentation, j’entends le traiteur et ses nombreux employés parler à voix haute, remuant leurs équipements afin de serrer le tout dans leurs camions et camionnettes. Je fais avec, en souhaitant que l’auditoire ne les entend pas. C’est tellement écho et ils parlent tellement fort que ça ne peut être possible.

Et là, tout à coup, l’impensable se produit! Ils démarrent les camions – dont la plupart polluent en raison de leur état vieillissant, alors que je n’en suis qu’à mes premières minutes, envoyant des nuages de fumée toxique de monoxyde de carbone partout sur la scène, au dessus des tables des dignitaires, dans un vacarme indescriptible!

Et comme finale théâtrale, l’ouverture des portes extérieures de l’aréna pour sortir leurs bazous provoque un immense courant d’air qui fait lever les lourds rideaux noirs derrière moi, ce qui me propulsera subito vers l’avant scène, où j’ai eu juste à peine le temps d’arrêter mon envolée et éviter d’aboutir sur les tables des convives un peu plus bas.

Voilà! Et qui a dit que le métier de conférencier n’était pas physique? C’est aussi ça le métier : s’adapter et survivre.

Marc André Morel

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