Vous n’êtes pas ce qui vous arrive
La vie est ponctuée d’épreuves de toutes sortes. Des exemples communs sont le divorce, une mise à pied, perte financière, maladie, etc. Il s’agit ici de situations courantes. Là où nous ajoutons à notre douloureux karma, c’est avec le langage que nous utilisons :
- Je suis malade
- Je suis blessé
- Je suis divorcé
- Je suis cassé
- Je suis fatigué
Le pouvoir de «Je suis»
S’il est vrai que les deux mots jumelés les plus puissants du langage humain sont «Je suis», ces derniers énoncés méritent notre attention. Depuis des millénaires, les guerriers, empereurs, reines, entrepreneurs, athlètes et citoyens comme vous et moi en quête d’une meilleure vie, utilisent comme mantra cette combinaison engageante, «Je suis», comme préfixe à ce qu’ils choisissent de devenir ou d’obtenir. Vous le savez, l’incantation: «Je suis bonne, je suis belle, je suis capable» aura transformé, voire sauvé, des vies.
Qu’on le veuille ou non, le processus d’identification qui suit chaque incantation, consciente ou inconsciente, du type «Je suis malade» ou «Je suis sans le sou», s’inscrit solidement dans le subconscient.
Le désormais célèbre religieux catholique italien du 13e siècle, Saint-François d’Assise, disait : «Il est fatigué», lorsqu’il ressentait que son corps s’épuisait. Bien que cette forme de langage serait difficilement appropriée entre nous, le détachement que le Frère François créa en rapport à son corps grâce à une sémantique différente, est un modèle pour nous.
Nous ne sommes pas notre corps. Pas plus que nous sommes ce qui nous arrive. Nous ne sommes pas nos blessures à l’âme («Je suis dans tous mes états»), ni la douleur provoquée par une parole assassine de la part d’un conjoint ou collègue («Je suis atterré.e»), ni notre dernière intervention chirurgicale ( J’ai eu ma chirurgie vendredi dernier»). Combien de fois avons-nous entendu des gens dire : «Mon cancer». Wow! C’est puissant.
Que faire, alors?
Nous n’avons jamais appris à étudier et surveiller notre langage en ce sens. Pour vous aider à vous dégager et libérer de ce qui vous arrive, voici quelques exemples d’un langage plus prudent :
- Mon cancer : le cancer, la condition
- J’ai eu ma chirurgie vendredi dernier : on a procédé à la chirurgie vendredi dernier
- Je suis atterré.e de ce que David m’a dit : Ce que David a dit ne m’appartient pas (pas ce que David m’a dit) – je prends le temps qu’il faut pour m’en dissocier
- Je suis dans tous mes états après avoir appris que Nathalie m’ait trahi : La décision de Nathalie a ravivé des blessures du passé
- Je suis sans le sou : Le temps est venu de trouver une solution à cette situation
- Je suis malade : Mon corps est en train de combattre (un rhume, une grippe, etc.)
J’espère que ces exemples vous aident à comprendre l’ampleur des dégâts collatéraux que nos réflexes sémantiques peuvent avoir sur notre personne, bien au-delà de ce qui nous est arrivé. En plus d’éviter de nous identifier malgré nous à ces circonstances qui ne nous appartiennent aucunement, pourquoi ne pas en profiter pour étendre notre nouveau savoir-être à notre langage de tous les jours ? Par exemple :
- Mes diplômes : les diplômes, les attestations
- Ma maison : la maison, la demeure familiale
- Mon travail : le travail, l’emploi que j’occupe
- Et ainsi de suite.
Au cours des prochains jours, si, à chaque fois que vous écrivez un courriel, vous reculez votre curseur afin de corriger un «ma, mon ou mes» pour un «la, le ou les», et que vous commencez à vous sentir plus léger, eh bien, j’aurai gagné mon pari…euh, le pari qui pourrait vous aider à vous détacher de ce qui vous arrive, et de ce qui ne vous a jamais appartenu.
Marc André
Photo: Alistair Macrobert
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